Louise GERMAIN
Renaturation de l’avenue Rákóczi - D’une autoroute urbaine à une promenade diversifiée, nouveaux lieux de vie dans Budapest
« L’urbanisation massive, le fait de ne pas vivre au quotidien au contact de formes de vie multiples, nous ont dépris des puissances de pistage (...) Cet art de lire s’est perdu, on "n’y voit rien", et il y a un enjeu à reconstituer des chemins de sensibilité, pour commencer à réapprendre à voir. »
- B.Morizot, dans "Manières d’être vivant"
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Les villes, à travers les âges, ont été le reflet de nos aspirations, de nos triomphes et, parfois, de nos myopies ; elles sont un témoin de notre relation complexe et évolutive avec le vivant. Érigées sur des sols autrefois vierges et nourriciers, elles se sont transformées en vastes étendues minérales, symbolisant notre domination sur la nature. Aujourd’hui, ces mêmes villes subissent les contrecoups d’un changement climatique devenu inévitable : des canicules étouffantes aux inondations dévastatrices, notre cadre de vie urbain est mis à rude épreuve.
Dans le contexte multi-crises actuel, la renaturation des villes fait partie des leviers de projet à saisir. Par définition, renaturer c’est restaurer et intégrer des espaces naturels dans l’environnement urbain afin d’améliorer la qualité de vie, la biodiversité et la santé physique et mentale des citadin.e.s.
La ville de Budapest ne fait pas exception et doit faire face aux effets du changement climatique. Capitale de la Hongrie, elle s’étend sur 525 km2 et compte environ 20% de la population du pays. Un grand axe structurant de Pest se démarque : l’avenue Rákóczi. Historiquement la rue piétonne et commerçante principale, l’explosion de la voiture pendant le 20ème siècle a façonné son visage actuel. En effet, aujourd’hui il s’agit d’une artère à 6 voies, souvent décrite comme une autoroute urbaine. 2,6 km de long, 25 à 30 m large : ce gabarit imposant et le trafic encombré coupent complètement le centre de la ville. Emprunter ou traverser Rákóczi est dangereux et inconfortable.
Ainsi, je propose de me saisir de cet axe urbain comme site de PFE, afin d’en faire le support d’un projet de renaturation urbaine.
Je propose une double stratégie multiscalaire qui s’ancre dans les plans de développement de la ville :
D’une part, le long de l’avenue Rákóczi, la voiture a de moins en moins sa place en s’approchant du centre-ville, pour laisser place à des espaces vivants abritant activités humaines, faune et flore urbaines. Aujourd’hui véritable frontière entre les quartiers, Rákóczi deviendra une interface et un trait d’union en prenant de l’épaisseur grâce au développement de nouvelles transversales.
D’autre part, un geste fort comme une coulée verte, mouvante, crée des lieux de respiration dans la ville dense, des espaces publics végétalisés avec des usages diversifiés pour les citadin.e.s. Elle relie les espaces naturels existants et renforce la stratégie de renaturation. Une approche novatrice de la conception urbaine basée sur une meilleure intégration du vivant se formalise par dualité, dialogue, combinaison ou même fusion entre la nature et les éléments bâtis ou non bâtis existants.
Par ce projet multiscalaire, Rakóczi peut créer du lien dans le mouvement, devenir le support d’un urbanisme adapté aux enjeux de demain, et un trait d’union entre les quartiers, les habitant.e.s et les citadin.e.s. Dans les espaces publics, les Budapestois.e.s sont invités à se resynchroniser avec les cycles des saisons, créant un pont entre la cadence trépidante de la vie citadine et les rythmes mouvants de la nature. La ville comme un écosystème foisonnant, embrasse alors la diversité des manières d’être vivant, reconnaissant chaque espèce, chaque individu, comme un acteur essentiel de l’équilibre urbain.