Marie Marchand
Transformation de la maison d’arrêt de Troyes en symbole d’espoir et de mémoire
Dans le centre-ville de Troyes, entre la cathédrale et les quais des Comtes de Champagne, se trouve l’ancienne maison d’arrêt dont la fonction s’est arrêtée en décembre 2023 du fait de sa vétusté. L’activité pénitentiaire a été délocalisée en périphérie et la parcelle de l’ancienne maison d’arrêt et les bâtiments ont été rachetés par la mairie de Troyes. Cette dernière n’a pas encore décidé de leur reconversion, mais souhaite composer avec les bâtiments patrimoniaux existants.
Prison durant trois siècles, le site abritait avant la Révolution française le couvent des Cordeliers. Le couvent troyen fut fondé au 13ème siècle et fit construire un cloître, une église, une chapelle et un prédicatoire. Seul le corps du couvent reste de cette époque, car sa forme était adaptée à une transformation en prison. L’usage carcéral engendra la construction d’une conciergerie comme séquence d’entrée et d’un mur d’enceinte. Ainsi le site est, depuis le 19ème siècle, une enclave en plein centre-ville.
L’enjeu actuel est de réintégrer ce site dans le centre-ville pour profiter des 7000 m² de surface qu’il a à offrir, ainsi que du patrimoine bâti qui l’occupe, tout en succédant au passé carcéral lourd. La question est donc de savoir de quelle manière transformer le site de l’ancienne maison d’arrêt de Troyes pour qu’il puisse se connecter à l’urbanité qui l’entoure, tout en transmettant les mémoires qu’il renferme.
Des espaces de justice restaurative et de soutien aux anciens détenus transforment la symbolique du site d’un milieu carcéral punitif en un lieu de renouveau, d’espoir et de réinsertion sociale. Le site comme les détenus sont réintégrés à la société. A ces programmes s’ajoutent un CIAP (Centre d’Interprétation de l’Architecture et du Patrimoine) et de la formation à l’artisanat d’art, qui invitent des publics plus variés et sont un moyen de perpétuer la mémoire du lieu, entre cloître et prison.
La clef pour rendre le site à la ville est l’ouverture, tant physique, en enlevant en grande partie le mur d’enceinte et en désengorgeant et perçant les bâtiments, que publique. La parcelle devient donc un plateau rendu poreux et accessible, dont l’aménagement accompagnant la programmation, oriente les différents espaces. A l’échelle du quartier, le CIAP et l’artisanat d’art génèrent une nouvelle poche culturelle qui répond à la place de la Cathédrale. A l’échelle de la ville, le site crée l’amorce d’une continuité de mobilités douces à travers la tête du bouchon de champagne.
L’intervention architecturale redonne ses lettre de noblesses aux bâtiments patrimoniaux tout en signifiant un nouvel usage à travers des inserts bétons, qui indiquent les entrées des différents programmes. L’extension, symbolise le renouveau du site et sa nouvelle orientation en y accueillant la justice restaurative.
Finalement, la transformation de la maison d’arrêt de Troyes lui permet de devenir un symbole d’espoir dans la manière de traiter les délinquants pour leur permettre de revenir à la société, un lieu de mémoire du passé du site comme du passé de la ville, et une vitrine du savoir-faire local.