Océane Maglione
SOULAC SUR MER, VILLE MOUVANTE
Aujourd’hui la crise climatique est connue de tous et les différentes alertes des scientifiques nous prouvent encore une fois qu’elle n’est plus à ignorer. Ses conséquences, commencent à élever brutalement les consciences mais n’amènent pas à un réel plan d’action, ce qui va avoir un impact considérable sur nos territoires et sur notre mode de vie, d’habiter.
Depuis de nombreuses années et pour faire face à ces problématiques grandissantes, l’être humain a érigé et mis en place des équipements lourds afin de tenter de dompter ces phénomènes naturels et poursuivre notre mode de vie sédentaire en bord de mer. Cependant, ces solutions voient leurs limites, et face à l’urgence, on ne peut plus ignorer la réalité et l’ampleur du phénomène.
Derrière ça se trouve alors une problématique importante de reconversion de ces territoires de plus en plus menacés et de l’accompagnement de la population à ces changements. Que ces aléas et cette vulnérabilité soient moteurs de conception et que l’être humain retrouve ce rapport d’humilité avec la nature : s’adapter plutôt que résister.
En France, la côte atlantique commence déjà à être fortement impactée par le changement climatique. Pour conséquence, des phénomènes d’érosion violents se font de font de plus en plus courants et menacent des villes balnéaires qui bordent cette côte.
Parmi celles-ci on retrouve la ville de Soulac-sur-Mer, petite ville balnéaire de 2800 habitants située au Nord de la région Médocaine en Gironde. Ville au patrimoine architectural typique, elle accueille également une biodiversité extrêmement riche et variée.
Ville mouvante depuis son existence dû à des aléas naturels violents, elle est aujourd’hui menacée par un phénomène d’érosion sur sa côte ouest (océan) et par la montée des eaux sur sa côte est (fleuve).
Ces deux phénomènes intimement liés à la hausse du niveau de la mer,
sont gérés par du rensablement massif et des digues dont l’efficacité
atteint ses limites.
L’être humain entretient aujourd’hui un rapport frontal avec l’océan ne permettant pas de s’adapter et de faire face aux futurs enjeux. Ce combat contre l’océan est aujourd’hui vain et à Soulac, les alternatives
peuvent être encore prises en avance et anticipées. Et si on décidait de s’adapter plutôt que de continuer à résister ? Comment alors fédérer une population et l’accompagner vers cette transition de Soulac, sans subir l’urgence ? Et enfin comment inverser le paradigme et utiliser ces phénomènes comme une ressource ? Plutôt que de voir la contrainte et la fatalité, je souhaite, à travers ce PFE, montrer que ces enjeux sont une réelle chance d’adaptation et de métamorphose de la ville.
J’imagine une stratégie urbaine résiliente autour d’un fil reconnectant la ville et ses deux eaux. Le long de ce parcours, des polarités permettent d’accompagner la population, de l’accueillir, de la faire vivre autour de programmes fédérateurs, vivriers, éducatifs, culturels, artistiques et mémoriels : un nouveau souffle pour les habitants à l’année de Soulac. Adaptée à chaque particularité du site, cette stratégie est flexible
et phasée dans le temps permettant de s’adapter, d’anticiper et donc
d’accompagner plus en douceur et progressivement les Soulacais.
Côté érosion (ouest), on redonne à la dune son épaisseur, son caractère auto-protecteur en la revégétalisant et en la sacralisant. Dans cette espace de transition entre ville qui recule et dune, j’imagine donner de la place à l’art, à l’éphémère, à la mémoire : un peu de poésie face au deuil des maisons que l’on a aimées.
Côté montée des eaux (est) on vient tirer profit, valoriser et utiliser l’énergie de ce phénomène pour développer une économie locale autour de l’aquaculture. La topographie vallonnée du centre de Soulac et certains vides urbains permettent d’envisager de nouvelles zones à densifier pour permettre aux habitants de continuer à vivre s’ils le souhaitent à Soulac,
dans des habitats plus adaptés et adaptables. Je souhaite recréer du
lien social, des espaces collectifs permettant de partager, de s’exprimer,
tout en assurant des espaces intimes où l’on se sent bien « comme à la
maison ».
Ce projet vient proposer, un scénario parmi tant d’autre à encore imaginer, d’adaptation d’une ville menacée, sous le prisme de l’architecture, de l’aspect humain, des ressources et énergies, du paysage...etc. Ce scénario, que je ne prétends pas comme étant celui à adopter, vient expérimenter l’approche de repli et de résilience de la ville face à la force de la nature. Plutôt que de tenter de dompter celle-ci, on vient s’adapter à sa mouvance.