Mathilde Bois
RE-SOURCER - Un centre de compétences au sein du quartier historique de Telouet
On découvre le village de Telouet au détour d’une route sinueuse à travers le Haut Atlas, peu avant Ouarzazate et après avoir parcouru des lacets pendant près de trois heures depuis Marrakech. Ce village berbère du Maroc présaharien s’articule autour d’une oasis ayant rendu possible l’établissement humain malgré un climat désertique et une topographie escarpée.
Surplombant l’oasis, se trouve une kasbah abandonnée qui abrite depuis le XIXe une histoire aussi prestigieuse que triste fortement marquée par la colonisation. Cette époque a d’ailleurs impacté le destin du territoire de manière profonde en participant à sa marginalisation : l’altérité de la civilisation berbère a longtemps été niée au profit d’un sentiment d’antériorité. Aujourd’hui, il fait face à des problèmes structurels tels que l’exode rural, un manque d’activité économique et court le risque de la crise identitaire. Pour autant, il reste particulièrement attractif pour l’industrie cinématographique et pour le tourisme.
Le rapport entre le patrimoine et le tourisme est une question sous-jacente soulevée par le projet. En effet, au Maroc, la patrimonialisation passe souvent par une mise en tourisme de lieux reproduisant ainsi les inégalités sociales dont les bâtiments prestigieux étaient jadis le siège.
A travers ce projet, l’objectif est en effet de reconnecter la population à son patrimoine tout en participant au développement économique du village. Pour cela, plusieurs leviers sont activés : l’artisanat, l’architecture, l’agriculture et la culture, à travers la danse notamment. La démarche se veut inclusive, le tourisme repose sur un patrimoine vivant, loin des clichés actuellement véhiculés par certains acteurs de la filière. L’habitant se sent alors détenteur de son patrimoine et acteur de la valorisation de sa culture.
Une programmation culturelle en lien avec les métiers de l’artisanat se répartit de part et d’autre de l’oasis. L’approche est globale, le centre de compétence fait face à la kasbah et se situe à la lisière entre le village et l’oasis, c’est une manière de connecter les habitants avec la citadelle mais aussi de renouer le lien avec l’oasis. Cette approche duale permet de réfléchir à une architecture contextualisée et contemporaine tout en réinvestissant la kasbah afin de la préserver et de l’ouvrir à tous.
Ce projet est le commencement d’un processus d’incrémentation. Tel l’agriculteur oasien, on plante la graine du changement à venir avec comme objectif la triple réhabilitation de la kasbah, des techniques constructives vernaculaires et de la fierté d’appartenir au Pays Glaoua.