Mathilde Pourrat
Générer un centre vivant à Charolles, S’appuyer sur les interactions avec le Vivant pour permettre un avenir rural résilient.
La ruralité est-elle vouée à disparaître ? Depuis les années 70, 1 million de paysan.ne.s et d’agriculteur.ice.s ont disparu, et les campagnes peinent à se dynamiser. Pourtant, des mouvements comme l’Atelier Paysan prônent le réinvestissement des campagnes pour lutter contre les stratégies agro-industrielles et pour développer des modes de vie résilients. En revanche, les mouvements de protestation qui ont émergé ces dernières années ont montré les difficultés des territoires ruraux à répondre aux exigences écologiques des grandes villes. Les milieux ruraux sont exclus des réflexions sociétales sur l’écologie et peinent à mettre en valeur leur statut pour développer un mode de vie résilient, conséquence d’une forme de domination de la Ville sur la Campagne.
Charolles, qui est un bourg rural de 3000 habitant.e.s situé dans le sud-ouest de la Bourgogne, connu pour son élevage bovin de qualité, concentre plusieurs problématiques rencontrées par la ruralité. On y observe en effet une perte de dynamisme économique et social, un phénomène de vieillissement de population important et un fonctionnement dicté par l’usage de la voiture au détriment du piéton et des autres modes de déplacements. Cependant, Charolles présente des qualités paysagères qui sont propres à son territoire et à son histoire, qu’il conviendrait de valoriser sans le muséifier dans un paysage de carte postale. En effet, une réactualisation de son identité est nécessaire pour rendre la rendre désirable.
En tant que concepteur.ice, de l’espace, comment amener les villes rurales à développer une résilience représentative de leurs spécificités ?
Charolles peut développer une identité tournée vers un avenir résilient, notamment grâce à sa porosité à intensifier entre espace humains et espaces « naturels », qui fait échos aux critiques de la pensée dualiste, opposant « humain » et « nature ». Cette dichotomie humain-nature justifie la domination du premier sur la seconde qui est alternativement un objet de contemplation et une ressource. La domination que la Ville (lieu créé par et pour l’être humain) exerce sur la campagne (constituée en grande partie de « Nature ») peut d’ailleurs se voir comme une conséquence de la domination de l’Humain sur la Nature.
Pour répondre à ces enjeux, je m’appuie sur deux outils de conception : intégrer le Vivant dans la conception de la ville et développer la ville relationnelle.
Pour cela, je développe 4 fils représentatifs des interactions humain-Vivant : le fil de paysage quotidien, de paysage nourricier, de paysage contemplatif et de paysage sauvage. Ces 4 fils dessinent un cœur de bourg symbolique du « vivre-ensemble » et un axe habitant représentatif d’un bourg habité et dynamique.
Les espaces sont dessinés par le Vivant, ce qui les anime intrinsèquement, dans une forme de banalité recherchée. Ils gagnent ainsi en agilité, permettant les parcours individuels quotidien et les rassemblements plus ponctuels. L’intégration du Vivant dans la conception des espaces permet également de faire prendre conscience de l’évolution dans l’espace.
Ce projet de sol ne cherche donc pas à démontrer ou à tester une solution technique, mais vise par le dessin de l’espace public à changer le regard des habitant.e.s sur leur propre ville. Il cherche ainsi à développer la part relationnelle de la ville, pour donner aux habitant.e.s le pouvoir d’action nécessaire pour leur permettre de développer leur propre mode de résilience, en valorisant leur spécificités.