Clément MILLON

Dans les hauteurs d’Argentière, le massif du Mont-Blanc se dévoile. Glaciers et éperons rocheux encadrent la vallée de Chamonix. Treize mille personnes y résident, pour 80 000 à 100 000 touristes par saison, été comme hiver. Le téléphérique des Grands Montets est l’un des principaux accès à la haute montagne, principalement pour le ski l’hiver et l’alpinisme l’été. Partant du fond de vallée à 1200m d’altitude, il rejoint d’abord une gare intermédiaire, Lognan, à presque 2000m. D’ici, un second tronçon donne accès au sommet de l’aiguille des Grands Montets (3275m). L’incendie de la gare intermédiaire en septembre 2018 paralyse les deux tronçons et limite nettement les possibilités pour le tourisme, les activités et l’accès à la montagne. Économiquement, la reconstruction est pressante. Ce territoire, en première ligne des conséquences des changements climatiques actuels, est aussi à l’aube de grandes mutations paysagères, et par conséquent touristiques. L’ambition de ce projet est alors d’imaginer ces mutations, pour accorder nos constructions et nos usages dans un modèle de prospective à long terme. Dans ce temps, le ski ne sera plus possible ou rentable. L’altitude sera l’une des seules possibilités pour échapper aux canicules estivales. L’intérêt que nous portons à ce territoire sera certainement modifié, mais il restera un lieu de vie attrayant. Travailler autour du fil, dans le paysage. Comprendre, ressentir, expérimenter ce paysage. Le téléphérique est une connexion, un lien entre espaces et personnes. Il se place sur les frontières de différents écosystèmes. Entre espaces disconnectés, une tentative de recoudre les fractures apparues. Les dispositifs architecturaux viennent ponctuer, souligner ou relier les moments frontières du parcours. Espaces dessinés pour son rapport au paysage et à la société, chacun se développe ensuite dans une transversalité correspondante à chaque « couche paysagère » : bord de rivière, limite haute des sapinières, fin de la végétation et début des zones glacières. Les matériaux naturels, pierre et bois, viennent ainsi recomposer le paysage autour de ces lieux, dont l’usage passe d’un jour à l’autre entre l’abandon et la sur-fréquentation. Dans l’incertitude de l’avenir et de l’influence de nos aménagements sur cet avenir, la stratégie est plutôt de laisser une souplesse dans l’usage de ces lieux, avec un programme initial voué à s’adapter. Ne pas opter pour l’un ou l’autre mais proposer une capacité d’adaptation du dispositif, entre résilience paysagère et réversibilité constructive.